Alain Resnais n’est plus parmi nous

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Vicky Papaefthymiou
Vicky Papaefthymiou

Alain Resnais le grand réalisateur français, maintes fois récompensé en France et à l’étranger, est décédé à Paris le 1er mars 2014 à l’âge de 92 ans. Issu d’une famille aisée et cultivée (père pharmacien et maire de Treffléau) il manifeste très tôt (à 12 ans) son goût pour le cinéma. Il débute sa carrière en réalisant des courts et moyens métrages  (documentaires)  qui font sensation auprès des critiques et du public ; “Van Gogh” en 1948 est récompensé à la Biennale de Venise et aux Oscars.

Dix ans plus tard, il réalise son premier long métrage dont le scénario est écrit par Marguerite Duras “Hiroshima mon amour” qui divise critiques et spectateurs comme d’ailleurs beaucoup de ses œuvres. Puis suit une riche filmographie jusqu’à la fin de ses jours.

Contemporain de la Nouvelle Vague dont il ne partage pas l’esprit (introduction du “naturel” au cinéma depuis le décor jusque’ aux dialogues en passant par l’absence de contraintes techniques) il se rapproche du groupe de la “Rive Gauche” très engagé politiquement et socialement. Le fascisme, la liberté, les événements historiques et sociaux récents (guerre civile en Espagne, colonialisme), les sciences humaines ainsi que sa passion pour la photographie, la peinture, la littérature, la bande dessinée, le théâtre, la musique ont conditionné sa thématique mais aussi les procédés techniques qu’il a utilisés.

Le cinéma de Resnais est plutôt du cinéma “théâtral”, du cinéma dominé par l’artificiel et l’imaginaire. Il emprunte des procédés propres au théâtre comme l’aparté, la différenciation du personnage de la présence physique (le corps) de l’acteur. Par exemple un acteur peut incarner un personnage de sexe opposé (“Pas sur la bouche”) ou plusieurs personnages (“Smoking/No Smoking”). Il arrive aussi que plusieurs acteurs interprètent le même rôle (“Vous n’avez rien vu”).

Ce qui caractérise Resnais est son goût pour l’expérimentation permanente et l’innovation incessante tout au long de son parcours de créateur si bien qu’un de ses acteurs fétiches Pierre Arditi a dit que “Rien ne ressemble moins à un film d’Alain Resnais qu’un autre film d’Alain Resnais”. Sous sa direction la caméra glisse tantôt doucement tantôt brutalement pour fixer des lieux, se poser sur des figures et objets insolites, se déplace en alternance perpétuelle entre décor et mouvement psychologique, jonglant entre réalité et imagination.

L’année dernière à Marienbad
L’année dernière à Marienbad

Il focalise sur la complexité et le chaos de l’âme et met en évidence les dédales psychologiques et la préoccupation existentialiste des personnages. Il met l’accent sur tout ce qui tourmente leur existence en créant souvent une atmosphère teintée de mélancolie et marquée par la présence de fantômes et de la mort. Comme disait lui-même “Le cinéma est un cimetière vivant”.

Il s’attache à ses acteurs et techniciens et les sollicite à maintes reprises ; c’est ainsi que Sabine Azéma (sa compagne depuis 1980 et épouse depuis 1988) a participé à de nombreux films, de même Pierre Arditi (9 films avec Resnais), André Dussollier (6 films) et Lambert Wilson (4 films).

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Parmi les très nombreux films d’Alain Resnais on cite les très connus documentaires “Van Gogh”, “Guernica”, “Nuit et Brouillard”. De longs métrages tels que “Hiroshima mon amour”, “L’année dernière à Marienbad” (sur un scénario d’Alain Robbe-Grillet), “Muriel”, “La guerre est finie” , “Je t’aime, je t’aime”, “Stavisky”, “Providence”, “Mon oncle d’Amérique”,”La vie est un roman”, “L’amour à mort”, “Smoking/No Smoking”, “On connaît la chanson” (comédie musicale “innovée), “Pas sur la bouche” (adaptation d’une opérette de 1925), “Cœurs”, “Les herbes folles”, “Vous n’avez encore rien vu” et le film attendu qui va sortir en salles le 26 mars “Aimer, boire et chanter”.